Je m'appelle Gabriel. Je suis né en 1883 à Levallois, capitale des chevaux. Louis était mon père, très gourmand de mariages. Moi, depuis plus d'un demi-siècle, j'aime deux soeurs : Clara, la longue, photographe de shtetls, et Ann, la blonde, une femme d'affaires qui ne se donne que debout. Grâce à elles, ma vie aura ressemblé à une exposition coloniale : un faux empire, des rêves trop grands, un spectacle pour les familles... Grâce à elles, j'aurai connu l'Amazonie, Belem do Para, le positivisme, le port de Londres, la course automobile, la vie secrète de Clermont-Ferrand, les belles amies de Freud, le visage hideux du Vélodrome d'hiver, la vieille Hué, capitale des tombeaux... Et tant d'autres curiosités. Ann et Clara m'auront appris des vérités insoupçonnées, par exemple que le caoutchouc ressemble à la démocratie, il évite les guerres civiles entre les choses, que sans les bicyclettes jamais nous n'aurions perdu Dien Bien Phu, ou que les chagrins d'amour sont plus doux dans la jungle...
1945. Louis et Bénédicte se rencontrent, se sourient, puis se marient. Louis s'engage dans la reconstruction du pays, et Bénédicte fait de la jalousie son métier. Clara, leur fille, découvre le don des larmes : pleurer sera son seul plaisir. Quant à Charles, son petit frère, il s'étonne, à cinq ans, de n'être pas déjà ministre de l'Intérieur. Une comédie française raconte la course irrésistible de ces quatre personnages dans les coulisses de l'Histoire des vingt années d'après-guerre.
« Il faut se laisser porter par ce flot de talent généreux, comme par une pleine eau. » Le Monde
Sur le quai de la gare, son père lui avoue enfin : leur famille est ruinée. La crise a frappé durement, le couple divorce et doit vendre la maison. Sébastien se retrouve seul, envoyé dans un collège de province, dirigé par des Jésuites, fidèles de Loyola, à la poigne de fer. Confronté à la cruauté de ses camarades et aux échos effrayants de la guerre, Sébastien fera sa propre éducation.
Érik Orsenna est né en 1947. Les voyages, la mer et la musique tiennent une place essentielle dans sa vie et dans ses livres. Ses romans La Vie comme à Lausanne (prix Roger-Nimier en 1978), Grand Amour et Une comédie française sont disponibles en Points. Il a été élu à l'Académie française en 1998.
« Érik Orsenna a le sens des allégories, du pittoresque, des synthèses, de l'observation, de la durée. Autrement dit, il est superbement outillé pour le roman. » Le Point
Il s'agit d'amour, en effet. L'amour de la France et de ses paysages vus d'en haut, l'amour du grand collège qu'était l'Elysée au temps du premier septennat, l'amour agacé pour un Président, l'amour des invitées (la solennité du lieu leur donne des idées chaudes), l'amour des télégrammes de condoléances, qui peuvent conduire aux plus hautes carrières ministérielles... et bien d'autres amours encore. Gabriel, le héros de ce livre, se nourrit de tout. Comment lui en vouloir ? Les hommes comme lui, plus nombreux qu'on ne croit, doutent de leur propre existence. D'où des allures de fantômes et des pratiques de vampires timides. Un jour arrivent au palais un port de tête et une bouche trop charnue. En d'autres termes : une dame. Dès cet instant commence, au royaume désordonné des sentiments, l'apprentissage de la préférence.E.O.
Au grand dam de sa mère qui le voulait poète, Charles-Arthur ne rêve que d'une chose : devenir footballeur. Adolescent espiègle et gourmand, jeune homme épris de politique, Charles-Arthur vit la drôle de guerre enterré sous la ligne Maginot, s'engage prudemment dans la Résistance, avant de s'installer dans une carrière ronronnante de député centriste. Une satire réjouissante de la vie politique et de son idéal... à la suisse !
« Chaque page apporte sa brassée de trouvailles, sur tout. » Le Monde Prix Roger-Nimier 1978
Dans ma famille, de tradition catholique, nos prières se devaient de rendre hommage à dieu (pour l'ensemble de son oeuvre).
Mais, tout de suite après, il nous fallait dire notre gratitude au gulf stream (pour la chaleur de l'eau et la tiédeur de l'air). chaque fois que nous sortions, grelottants, de nos bains glacés de bretagne, une grand-mère était là pour s'exclamer : " remercie donc le gulf stream ! sans lui, notre mer serait froide. " et chacune de nos promenades au jardin s'accompagnait de gloussements : " qu'il se porte bien ce palmier, il me rappelle alger.
Qu'il monte haut cet agave, on dirait madagascar ! " au fond, le gulf stream nous consolait de la perte de nos colonies. bien des années ont passé. et aujourd'hui mon cher gulf stream m'inquiète. sa santé me préoccupe. va-t-il un jour, bientôt, comme on le dit, s'arrêter de couler ? qu'adviendra-t-il de la douceur de nos climats ? longtemps, j'ai fermé les yeux. mais le moment est venu. je ne suis pas scientifique.
Plutôt promeneur. alors, des violents remous du détroit de floride aux maelströms de norvège, des rivages fleuris d'ecosse aux abords légendaires de nantucket, je suis allé, par les chemins de terre ou de mer, rencontrer les savants et les lieux.
Accompagné du photographe Bernard Matussière, Erik Orsenna se rend à Cuba à la recherche de ses ancêtres.. « Toute famille a ses eldorados. Des lointains peuplés d'ancêtres forcément farouches, séducteurs et richissimes. Enfant, on me promenait sur les ports, on m'enivrait de Brésil et de Caraïbes, sans plus de précision. L'âge venant, j'ai décidé d'aller y voir.
Elle s'appelait Villademoros, papetière. Il se prénommait Augustino, négociant. Mes arrière-grands-parents. Ils habitaient La Havane, où ils étaient nés.
Cent vingt ans plus tard, Cuba coupe le souffle tellement les gens, les lie ux sont beaux, et serre le coeur tant l'échec est criant. Un grand Fidel est passé par là. Il voulait édifier le paradis sur terre... On peut construire des écoles, des hôpitaux. On ne force pas un peuple au bonheur. Surtout quand ce peuple le possède en lui. Vous l'aviez deviné : en même temps que l'arbre généalogique, nous avons visité les ruines du rêve. »