Quel est le véritable Héraclite ? Celui de Hegel ? Celui de Nietzsche ? Celui de Heidegger ? Un autre ? La présente édition des Fragments de son oeuvre perdue vise, en conjuguant l'étude philologique et l'analyse philosophique, à restituer, autant que cela est possible, la pensée même d'Héraclite, dans son unité et sa cohérence. Ce qui surgit ainsi des ruines du texte est une structure belle, un cosmos, une sorte de temple grec déployant son harmonie dans la durée. Chaque fragment apporte sa précision nécessaire ; chacun est complémentaire de tous les autres; même si quelques-uns, plus décisifs, jouent le rôle de pierres d'angle. De ce temple, profondément logique, émanent un rayonnement, une sagesse, un appel, un espoir. De l'éternelle vérité, aucun philosophe fut-il jamais dans une proximité plus grande ?
Avec Héraclite, dit Hegel, « la terre est en vue ».
Ce livre repose sur une décision et fait fond sur un pari : il est possible de lire aujourd'hui philosophiquement les pères de l'église et les médiévaux, jusques et y compris dans les objets de la théologie.
Certes, on n'a pas attendu ni la phénoménologie pour interroger à nouveaux frais le corpus de la théologie, ni les textes patristiques et médiévaux pour y découvrir une posture inédite pour la phénoménologie. reste cependant que de l'une à l'autre - de la philosophie patristique et médiévale à la phénoménologie - le rapport est décisif tout autant qu'exemplaire. on ne se contentera pas, dans cet ouvrage, de sonder les racines patristiques et médiévales de la phénoménologie, mais on fera travailler la phénoménologie elle-même dans le corpus de la théologie, pour y faire voir ce que ni l'une ni l'autre n'ont peut-être pas encore vu : l'ultime possibilité de décrire phénoménologiquement les modes de manifestation de la théologie, jusques et y compris dans le vécu interne des textes de la tradition aujourd'hui à (re)découvrir.
Indépendamment de leur effectivité, les concepts théologiques se traduisent ainsi en des termes philosophiques que la phénoménologie doit légitimement interroger : relation et substance dans la trinité et onto-théologie (augustin), théophanie et apparition du phénomène (jean scot érigène), détachement et réduction (maître eckhart), création d'adam et visibilité de la chair (irénée), incarnation christologique et épaisseur du corps (tertullien), conversion des sens et intercorporéité (bonaventure), communion des saints et genèse de la communauté (origène), traité des anges et inter-subjectivité (thomas d'aquin), appel du nom et singularité d'autrui (duns scot).
La méthode ou le chemin vaut toujours davantage que le résultat, si tant est que l'on s'y laisse conduire. tel est ce que voudrait atteindre notre pratique phénoménologique de la philosophie médiévale, ici justifiée tout autant qu'exercée. les concepts de dieu, la chair et l'autre appartiennent certes, et exemplairement, au champ de la phénoménologie contemporaine, mais ils trouvent dans le corpus de la philosophie patristique et médiévale de quoi non seulement les enraciner, mais encore les renouveler.
C'est à en marquer l'essai que l'ouvrage ici veut s'essayer, charge à d'autres d'en revenir à l'impact, et de tenter de le transformer
Si Descartes est le premier à penser la vérité comme certitude (Heidegger), Pascal est le premier à en prendre acte pour penser la certitude de la foi (le Mémorial) et de la vraie religion.
Cet ouvrage est un recueil d'articles, inédits pour certains, organisé de façon chronologique et thématique : avant, pendant et après la célèbre conférence prononcée à Port-Royal, « De la vraie religion ».
En 1927, Être et temps éclate comme un coup de tonnerre. Heidegger y abat les deux fondements de toute la pensée occidentale : la subjectivité, avec son a priori (hérité de Kant) et son intentionnalité (venue de Husserl), et la temporalité, avec la double primauté de la succession et du présent. Tout au long du XX siècle, sous le poids d'un ouvrage qui s'attribue la rigueur argumentative d'un « Traité », la phénoménologie n'est plus jamais parvenue à renouer avec sa vocation transcendantale, apparaissant sous des versions herméneutiques, existentielles, ontologiques, cosmologiques, naturalistes, inspirées des thématiques larges que leur offre le texte-source.
Un concept de différence implique une différence qui n'est pas seulement entre deux choses, et qui n'est pas non plus une simple différence conceptuelle. Faut-il aller jusqu'à une différence infinie (théologie) ou se tourner vers une raison du sensible (physique) ? À quelles conditions constituer un pur concept de la différence ?
Un concept de la répétition implique une répétition qui n'est pas seulement celle d'une même chose ou d'un même élément. Les choses ou les éléments supposent une répétition plus profonde, rythmique. L'art n'est-il pas à la recherche de cette répétition paradoxale, mais aussi la pensée (Kierkegaard, Nietzsche, Péguy) ?
Quelle chance y a-t-il pour que les deux concepts, de différence pure et de répétition profonde, se rejoignent et s'identifient ?
Gilles Deleuze était professeur de philosophie à l'Université de Paris VIII-Vincennes.
La question centrale de cet ouvrage se situe à la croisée du réalisme et de l'idéalisme : comment peut-on à la fois affirmer que les objets dont traite la mathématique possèdent un être identique en tout temps et pour tout sujet pensant et qu'ils ont été produits par un sujet mathématicien ? L'idéalité des objectités formelles implique en effet leur autonomie ontologique vis-à-vis de la conscience, donc l'impossibilité de les produire ; or elles requièrent l'invention d'un système de notations symboliques et font leur apparition à un moment de l'histoire ; n'est-ce pas le signe de leur dépendance ontologique vis-à-vis de la spontanéité productrice de la conscience ? Partant, la vérité mathématique doit-elle être entendue comme adéquation de la connaissance à des objets préexistant en soi, ou comme dévoilement d'objets n'ayant ni existence en soi, ni préexistence à l'acte qui les dévoile ?
Comment la « science théologique », qui accomplissait par excellence le désir de savoir et constituait le sommet de la métaphysique d'Aristote, a-t-elle intégré dans un système rationnel (le néoplatonisme) les symboles et les rites du polythéisme grec ? Comment, chez les stoïciens, la théologie physique (philosophique) a-t-elle appris à rendre compte des rites de la théologie politique et des symboles de la théologie mythique ? Comment le christianisme s'est-il emparé du projet, au point de construire à son tour une rationalité discursive à partir des images et des récits contradictoires de l'Écriture ? Comment, en terre d'islam, la théologie métaphysique s'est-elle alliée à la théologie politique pour régler l'interprétation des mythes et rejeter l'apologétique religieuse ? Comment et pourquoi la théologie mystique et la théologie symbolique ont-elles été refoulées hors du champ de la théologie spéculative ? Enfin, comment et pourquoi, à partir de Galilée, la théologie a-t-elle cessé d'être la science suprême, et dû reconnaître l'autonomie critique de la science ? - Telles sont les questions auxquelles cet ouvrage s'efforce de répondre.
Ce volume contient l'édition critique et la traduction française de l'Ethica, munies d'une introduction, de notes et de deux annexes (sur les mathématiques et la physique).
L'établissement du texte par Fokke Akkerman et Piet Steenbakkers prend pour base l'édition latine des Opera posthuma de 1677, confrontée avec la version néérlandaise des Nagelate Schriften et avec le manuscrit récemment découvert dans les archives du Vatican - seul témoin connu de l'état du travail en 1675, transcrit par un ami de Spinoza (van Gent) à l'usage d'un autre (Tschirnhaus) et demeuré inconnu jusqu'en 2010. La traduction de Pierre-François Moreau met en application les principes définis pour la série des oeuvres de Spinoza, fondés sur la recherche de la cohérence lexicale et c onceptuelle et sur l'analyse des écarts sémantiques. Elle établit la première édition française du livre le plus célèbre de Spinoza prenant en compte les apports du manuscrit découvert en 2010.
Le projet de retrouver l'unité de la philosophie de Bergson ne pouvait être mené à bien que depuis la méthode qui en avait à proprement parler fait une oeuvre.
L'erreur fut de ne pas prendre en considération le statut profondément réformé de la métaphysique qu'il instaure et qui procède au retournement de la métaphysique traditionnelle : non plus se fonder sur un premier principe, mais se fondre dans l'expérience immédiate, c'est-à-dire descendre en soi-même, livre après livre, vers des couches de plus en plus profondes de la durée concrète. L'oeuvre entière doit se comprendre à rebours, en sorte que chaque livre fournit les bases au livre précédent au lieu de le supposer, l'intègre dans un cadre plus large et profond - sorte d'essais concentriques où le dernier livre englobe les précédents.
Il s'agit en un sens d'une archéologie, mais comprise dans les limites indéfiniment reculées de l'intuition, Bergson n'atteignant que dans son dernier livre, le véritable principe agissant. Il est dès lors possible de reprendre le mouvement unique qui traverse l'oeuvre. En l'étayant des notes et des cours inédits de Bergson, nous pouvions montrer comment chaque livre doit se prolonger dans le suivant en gravitant à chaque fois autour d'un problème précis : la liberté, l'union de l'âme et du corps, la causalité, la volonté enfin.
S'enfonçant dans des couches de durée de plus en plus profondes, Bergson ne fait en vérité qu'approfondir un unique problème, celui de la personne qui est pour la première fois pensée comme temps, chaque livre privilégiant l'une de ses dimensions : le présent (Essai sur les données immédiates de la conscience), le passé (Matière et mémoire), l'avenir (L'Évolution créatrice), l'éternité (Les Deux Sources de la morale et de la religion).
C'est l'oeuvre entière qui s'avère être un corpus sur le temps.
Avec Hume, l'empirisme ne se définit plus essentiellement par l'origine sensible des idées.
Il développe trois problèmes, les relations, les cas, les illusions. D'une part, les relations sont toujours extérieures à leurs termes, et dépendent de principes d'association qui en déterminent l'établissement et l'exercice (croyance). D'autre part, ces principes d'association n'agissent qu'en fonction des passions, pour indiquer des "cas" dans un monde de la culture ou du droit : c'est tout l'associationnisme qui est au service d'une pratique du droit, de la politique et de l'économie (suffit-il, pour devenir propriétaire d'une cité abandonnée, de lancer un javelot sur la porte, ou faut-il toucher la porte du doigt ?).
Enfin, de telles règles de légitimité des relations peuvent-elles être séparées des fictions, des croyances illégitimes qui les accompagnent ou les doublent ? Si bien que la philosophie est moins critique des erreurs que dénonciation des illusions inévitables. Dans tous ces domaines, l'empirisme opère la substitution de la croyance pratique au savoir, dans une entreprise athée qui consiste à naturaliser la croyance.
Parce que l'infinité divine n'est pas une évidence théologique, Descartes travaille à lui donner un sens particulier : à la fois instauratrice des vérités créées dans les lettres du printemps 1630 et nom divin par excellence selon les exigences de la philosophie première en 1641, elle endosse des déterminations passablement contradictoires, non métaphysiques et pourtant au plus haut point métaphysiques. La détermination de la situation de l'infinité de Dieu chez Descartes au regard d'autres concepts du corpus (immensité, indéfini), de ses rapports au concept aristotélicien d'apeiron et de son histoire médiévale (Thomas d'Aquin, Bonaventure, Henri de Gand, Scot) et moderne (Suarez, Bérulle, Montaigne) doit permettre de faire voir la tension interne dont l'infinité grève la métaphysique cartésienne. Les analyses d'Emmanuel Levinas seront précieuses pour révéler les tensions ici à l'oeuvre.
Paru à Amsterdam en 1670, le Traité veut montrer que la liberté de philosopher n'est nuisible ni à la piété ni à la conservation de l'État. Il marque la première intervention publique de Spinoza dans les domaines de la religion et de la politique et occupe une place particulière dans son oeuvre. La violente polémique qui suit la publication en montre l'importance.
À l'âge classique, les Pays-Bas sont l'un des principaux centres de la république des lettres. Dans un pays qui passe alors pour le plus tolérant d'Europe, pourquoi prendre la peine de défendre la liberté de conscience ? Spinoza s'en explique dans une lettre à Oldenburg en 1665 : les préjugés des théologiens, les accusations d'athéisme dont il est l'objet et les menaces sur la liberté de philosopher et de penser, en sont les raisons. La dimension juridique et politique est mise provisoirement en retrait de par les attaques virulentes des religieux.
L'interprétation de la pensée cartésienne résulte toujours, comme il est normal, du rapport entre ses textes et les préjugés de ses lecteurs. En conséquence, certains points décisifs restent toujours voilés par les divers " cartésianismes " dont l'historiographie les a recouverts. On tente ici de dégager successivement le statut positif du scepticisme, le caractère non substantiel (ni réflexif) de l'ego cogito, la complexe élaboration de l'idée d'infini, le rôle de l'estime comme mode de la cogitation, etc.
On compare aussi les thèses cartésiennes authentifiées avec leurs interprétations, critiques ou partisanes, chez ses interlocuteurs contemporains (Pascal, Hobbes, Spinoza, etc.). Il résulte de ces enquêtes que Descartes n'appartient pas moins à notre avenir qu'à notre passé.
Paru pour la première fois en deux volumes il y a une vingtaine d'années et réédité plusieurs fois entre-temps, L'événement et le monde retrouve sa forme originelle, celle d'une seul et unique ouvrage dont l'édition a été entièrement révisée par l'auteur. Cet essai philosophique visant à comprendre l'homme comme " advenant ", c'est-à-dire comme ce vivant auquel il peut arriver quelque chose, seul " capable " d'événements au sens fort du terme - de bouleversements complets de son existence -, pourra être ainsi redécouvert dans son intégralité.
Cette phénoménologie de l'événement noue un dialogue étroit avec l'ontologie fondamentale de Heidegger dont elle souligne l'incapacité à intégrer la dimension " événementiale ", et singulièrement le phénomène de la naissance, dans sa compréhension de l'existence humaine.
Un manuel de préparation aux concours et à l'épreuve de culture générale. Les étudiants préparant les concours des grandes écoles y trouveront matière et méthode pour réussir efficacement cette épreuve. Mais ce livre est aussi un guide moderne et attrayant pour un " nouvel honnête homme ".
Éric Cobast enseigne la culture générale et les sciences humaines dans les classes préparatoires Ipésup, Prépasup et IES de l'Université de Paris II, et la littérature dans les classes de Lettres supérieures du lycée Madeleine Daniélou.
L'ouvrage ici proposé doit être considéré comme étant bien de Husserl. Son éditeur, L. Landgrebe, expose en Avant-propos les circonstances de son élaboration, et soutient qu'il " ne contient rien qui ne puisse au moins s'appuyer sur des exposés oraux de Husserl, et s'autoriser de son acquiescement ". De telles affirmations se laissent aisément vérifier par le repérage des textes originaux qui ont servi à la constitution de Expérience et jugement (voir notamment le volume XI des Husserliana).
Ce livre veut établir l'unité de la passivité, de la réceptivité et de la spontanéité dans la perspective d'une " généalogie de la Logique ". Celle-ci se limite à l'aspect cognitif de l'expérience, et s'oriente vers la mise au jour des " objectivités générales ".
L'émergence d'une problématique husserlienne du monde, compris comme horizon de toute présentation, notamment du " monde de vie ", et la concurrence de cette problématique avec la thématisation du " substrat absolu " permettent de relancer et de nuancer l'appréciation du rapport entre Husserl et Heidegger. De son côté, la conception d'une " grammaire logique pure ", énoncée dans la IVe Recherche logique, se trouve effectivement mise en oeuvre ici, liée à une vue instrumentale du langage ; elle fait pressentir l'homologie structurelle, explicitée dans la Krisis, entre l'antéprédicatif et les prédications les plus élaborées de la science.
Selon Héraclite, « tout s'écoule », à savoir tous les prétendus « étants », mais le monde lui-même demeure comme l'écrin où les étants brillent et scintillent tour à tour. Sous l'influence d'Anaximandre, pour qui le moment de l'épuisement et de la mort, qui advient inévitablement pour les êtres finis, advient aussi pour le monde, Parménide radicalise la pensée d'Héraclite : comme tout ce qui est au monde, le monde lui-même est à la merci de la puissance universelle et annihilante du temps. Reste pourtant ce sur quoi le temps n'a aucune prise : non ce qu'il y a, mais le fait même qu'il y ait. Comme, chez Héraclite, le logos nous fait saisir l'éternelle vérité de l'être ; mais cette seconde vérité n'annule pas la première. - Qu'en est-il de l'être ? L'être n'est que la Présence, la présence sans trace d'absence, donc sans passé ni futur. Elle est le Site où tout bouge mais qui ne bouge pas, l'Ouverture où jamais ne cesse l'accueil de ce qui a lieu.
Texte grec, traduction, présentation et commentaire par Marcel Conche, professeur émérite à la Sorbonne.
Saint augustin ne parle pas la langue "grecque", ni celle des philosophes, ni même celle des pères de l'église.
Il ignore la moderne distinction entre théologie et philosophie, n'entendant en cette dernière que l'amour de la sagesse, donc de dieu et du christ. il n'appartient pas à la métaphysique, du moins entendue en son sens littéral et historique, le seul digne de discussion. et c'est pourquoi sa pensée reste toujours controversée et incertaine, d'autant plus que progresse l'érudition et les interprétations - parce qu'on lui a imposé, consciemment ou non, des lectures métaphysiques qui lui faisaient violence, ou parce qu'au contraire son étrangeté résistait à la métaphysique.
Il se pourrait donc qu'aujourd'hui il nous précède, nous qui sortons à peine de la métaphysique, lui qui n'y est sans doute jamais entré. il faut donc le lire à partir de ses propres critères et intentions: en l'occurrence à partir de ce qu'il nomme la confessio - parler une parole non pas produite, mais reçue et, une fois écoutée, rendue, afin de ne pas tant parler de dieu, que parler à dieu, soit dans l'aveu des fautes, soit surtout dans la louange (chap.
Ii. a partir de cet écart originaire à l'intérieur de la parole, il devient possible, inévitable plutôt, d'envisager l'accès à soi et son aporie. car, ici, la certitude d'exister conduit (au contraire du cogito cartésien) à l'inconnaissance de soi. l'habite précisément hors du soi: dans la mémoire (l'immémorial, plus encore que l'inconscient) (chap. ii). ainsi j'habite dans le découvrement non pas théorétique mais érotique de la vérité, qu'il faut aimer pour la connaître (chap.
Iii). ainsi j'éprouve, au moment d'aimer (ou de haïr) la vérité, l'indisponibilité de ma propre volonté à elle-même et mon exposition incessante à la tentation (chap. iv). l'altérité du soi à soi ne pourra jamais se dépasser, mais elle peut se penser. il faut pour cela identifier l'écart qui fait de je son autre le plus proche, mais le plus définitif. cet écart se déploie dans l'événement du temps lui-même, oú ce que je suis se déploie précisément et inéluctablement dans la distance, la distraction et l'écart l toute la difficulté consiste alors à user cette distance comme d'un élan hors de soi, non comme une dispersion en soi (chap.
V). l'écart ambivalent de sa temporalité assigne en fait le soi à sa finitude, ou plus exactement à son statut de créature (chap. vi): en tant que tel, l'homme n'a pas d'autre essence ni définition que sa référence à dieu, que son statut d'image renvoyée à la ressemblance de dieu. ce qui prend la place du soi, à savoir ce renvoi même à l'image et ressemblance, ne l'abolit donc pas, mais le reconduit à son lieu unique - à plus que soi, autre que soi, mais plus soi que soi, interior intimo meo.
A moins que cet excès sur soi, le soi de l'homme ne trouve pas de lieu oú se poser.
Une philosophie atteste sa grandeur en affrontant les questions les plus difficiles.
Donc, au premier chef, celle du temps. aussi est-ce dès 1904-1905, à göttingen, que husserl tenta une analyse phénoménologique du temps, en lui appliquant les concepts fondamentaux d'intentionnalité et de réduction.
En 1916, edith stein, alors assistante de husserl, entreprit d'éditer ces cours, et de les compléter par d'autres textes, postérieurs (1905-1910). ce n'est pourtant qu'en 1928 que l'entreprise aboutit, quand heidegger, qui venait de publier etre et temps (1927), édita pour la première fois les leçons.
Il déclarait en ouverture : " ce qui est décisif dans ce travail, c'est la mise en relief du caractère intentionnel de la conscience et, d'une façon générale, la clarté croissante que reçoit l'intentionnalité dans son principe (. ). aujourd'hui encore cette expression n'est pas un mot de passe, mais le titre d'un problème central. " bien qu'une édition plus complète soit, grâce aux soins de r. boehm, parue depuis dans les husserliana (bd.
X, 1966), la traduction d'h. dussort reste un outil de travail inappréciable, puisqu'elle donne accès à un texte qui fut, en 1928, à la fois un achèvement de la pensée de husserl, un hommage rendu par heidegger à son maître, et, sans doute, leur ultime croisement - à savoir une rencontre et indissolublement un éloignement.
Presque vingt ans après sa parution, Étant donné (Puf, 1997), au-delà des premiers débats, a imposé la question du donné et de la donation. Reprise du donné prolonge ces nouvelles interrogations.
D'abord la question de la réduction : définit-elle vraiment le principe dernier de la phénoménologie ? Si tel était le cas, la formule « autant de réduction, autant de donation » peut-elle se justifier (en discussion avec la critique de Michel Henry) ?
Ensuite la reconnaissance du donné comme instance première et dernière de la phénoménalité peut-elle encore faire droit à l'herméneutique (en discussion avec Hans-Georg Gadamer) ? Dans ce cas, comment se déplie le pli de la donation avec la manifestation ?
Et encore, le monde peut-il se manifester comme l'un des phénomènes donnés, et même comme la totalité du donné ? Ou ne faut-il pas lui reconnaître une donation par exception, celle de la possibilité de toute donation (sur la ligne de Jan Patocka) ?
Enfin, la reprise du phénomène à partir de la donation n'impose-t-elle pas de substituer décidément au modèle de l'objet, constitué à l'identique et pour lui, celui de l'événement, qui surgit à partir de soi seul, sans cause ni a priori (en faisant droit à Claude Romano) ? - See more at: https://www.puf.com/content/Reprise_du_donn%C3%A9#sthash.lCsB0zXt.dpuf
L'un des plus importants traités de métaphysique en occident est constitué par les Questions sur la métaphysique de Duns Scot (XIVe siècle). Dans cet original commentaire par questions, Duns Scot dépasse le projet encore contradictoire d'Aristote et construit la métaphysique comme une science. En une série d'analyses à la fois minutieuses et libres, il n'hésite pas à critiquer Aristote et à l'harmoniser avec d'autres pensées (arabes et chrétiennes). Pour la première fois dans l'histoire, la métaphysique devient une science transcendantale de l'être, univoque et incluant toutes choses, y compris Dieu. Il était nécessaire d'en donner une traduction française rigoureuse. Cette édition en quatre volumes est bilingue (latin-français), avec des notes légères et un bref commentaire synthétique de chaque question. Le volume I, traduit par Olivier Boulnois et Dan Arbib, comprend les livres 1 (Expérience et science), 2 (Sur l'infini) et 3 (Genre et différence).